Sur le rire et la folie
Assis dans son jardin d’Abdère, sous un platane touffu, Démocrite rédige un ouvrage sur les causes de la mélancolie. Au grand désarroi du peuple, le vieux sage ne s’interrompt que pour disséquer des animaux et tourner les hommes en dérision : son rire étrange, féroce, incoercible, est le sujet d’un petit roman philosophique qui, avant de tomber dans un injuste oubli, a inspiré nombre de peintres et d’écrivains. Les Lettres attribuées à Hippocrate, mais datées du début de notre ère, ne composent pas seulement une charmante fable (dont La Fontaine s’est souvenu) ; elles n’ont pas pour seul intérêt de déployer le fouet de la satire. Elles doivent être lues comme l’un des textes fondateurs de la réflexion occidentale sur l’ambiguïté de la folie.